Un véritable tour de force : celui de faire paraître, moins de six mois après sa spectaculaire émergence, un ouvrage sur l’État Islamique qui ne soit pas purement factuel. On trouvera dans cet ouvrage agrémenté de cartes et de nombreux graphiques des éléments pour comprendre et décider.
Plus que cela, fidèles à leur approche géoculturelle, les deux auteurs nous font pénétrer les arcanes de la psychologie de cette entreprise, dans un contexte où les Arabes sunnites de Syrie et d’Irak ressentent une profonde frustration au regard des évolutions politiques de la région. C’est en se référant à la culture religieuse islamique que l’on est à même de comprendre les manifestations tout sauf délirantes de l’organisation, y compris dans leur dimension médiatique.
Conflits n°3 : insubmersible Japon.
Du reste, l’ouvrage est capable de nuances, notamment en montrant combien la désastreuse intervention américaine de 2003 a poussé les officiers sunnites baassistes dans les bras de l’organisation : leur nationalisme ombrageux est ainsi recyclé par l’eschatologie de l’État islamique.
Finalement l’État Islamique n’est qu’un symptôme, peut-être éphémère, de la crise profonde que connaît la région. Il est entré par effraction dans l’histoire du Moyen-Orient, grâce à la détermination sans faille de ses acteurs et à un corpus idéologique englobant. Conclusion des auteurs : "L’État islamique est un accident de l’islam et du Moyen-Orient, mais un accident mortel. "
L’État Islamique, Anatomie du nouveau Califat, par Thomas Flichy et Olivier Hanne. Bernard Giovangeli éditeur, 15 €