Quantcast
Channel: Liberté d'Expression
Viewing all articles
Browse latest Browse all 5209

La France en faillite

$
0
0

Dette. Notre dépense publique dépasse de 70 milliards, chaque année, en moyenne, les recettes de l’État. Et cela fait plus de trente ans que ça dure. Le prix de l’État providence, qui tue notre économie.

 

Quand Michel Sapin, fin janvier, sur Radio J, parlait de la France en lâchant : «Mais c’est un État totalement en faillite », il avait raison. Et il est inquiétant que le ministre de l’Économie, Pierre Moscovici, ait immédiatement corrigé les propos de son collègue du Travail, affirmant que « la France est un pays crédible et solvable », précisant que la déclaration de Sapin n’était qu’une « image ». Inquiétant encore que, pratiquement trois mois après la déclaration du président de la République, mi-novembre, lors de sa première conférence de presse, où il expliquait que la France devrait, durant le quinquennat, réaliser 60 milliards d’économies sur la dépense publique, on n’ait toujours pas la moindre piste concrète sur lesdites économies.

« La Cour des comptes s’attaque à l’indemnisation des chômeurs », titrait encore à la une le Monde du 23 janvier, citant le rapport qui qualifie les déficits de l’Unedic d’« insoutenables » et estime inévitable de réduire les indemnités versées aux chômeurs.

L’organisme qui gère l’assurance chômage devrait perdre 5 milliards d’euros en 2013, qui se cumuleront à près de 14 milliards de déficits.

Qu’il est loin le discours du Bourget du 22 janvier 2012 où le candidat François Hollande déclamait, lyrique, la voix déjà éraillée d’avoir trop crié : « Le rêve français, c’est notre histoire, c’est notre projet. » Un an après Le Bourget, c’est plutôt au réveil, à l’atterrissage dans la réalité, que sont invités les Français. Le réveil, c’est ouvrir les yeux. Pour voir que la France vit au-dessus de ses moyens. Autrement dit à crédit. Avec une dette qui dépasse aujourd’hui 1 820 milliards, passée en trente ans de 20 à 90 % du PIB ; avec une charge annuelle des intérêts de notre dette (proche de 50 milliards) qui représente l’équivalent de la totalité de l’impôt sur le revenu.

Le taux de prélèvements obligatoires a atteint 46 % du PIB en 2012. C’est-à-dire que la France a dépassé la Suède et n’est plus devancée, au sein de l’OCDE, que par le Danemark. En 2013, ce taux devrait atteindre 46,3 %, avec une fiscalité en hausse de plus de 30 milliards depuis le début du quinquennat Hollande. Déjà, les deux plans Fillon pris depuis 2011 avaient programmé des hausses d’impôts d’un peu plus de 31 milliards : coup de rabot sur les allégements de charges, taxe sur les assurances, TVA à 7 %, gel du barème de l’impôt sur le revenu, hausse des cotisations sur les revenus du capital… Au total, 65 milliards de hausses d’impôts entre 2011 et 2013. Ce n’est donc plus là que nous pourrons trouver les marges de manoeuvre nécessaires au redressement de nos comptes. Reste un seul levier : celui de la dépense. La dépense publique, qui atteint en France le niveau record de 56 % de la richesse nationale, en augmentation constante. En moyenne, au cours des trente dernières années, le niveau des recettes a été inférieur de trois à quatre points de PIB à celui des dépenses. Autrement dit, notre dépense publique dépasse de 60 à 80 milliards d’euros, chaque année, le montant des recettes qui entrent dans les caisses de l’État. C’est ainsi que nous finançons notre modèle social. À crédit. La crise ? Elle n’est qu’un accélérateur, un révélateur du mal français qui est en réalité très antérieur à 2008. La racine du mal français se situe bien dans notre niveau de dépenses publiques, et il est vain d’espérer le résoudre en misant sur le retour de la croissance ou de nouvelles hausses d’impôts.

Au coeur de cette dépense, trône notre “modèle” social. Il pèse pour plus de 600 milliards par an. Retraites, assurance chômage, minima sociaux, prestations familiales, santé, les dépenses sociales dites d’intervention ou de transfert ont représenté plus des trois quarts de l’accroissement de la dépense publique française, au cours des trente dernières années. La France vit au-dessus de ses moyens.

« Aujourd’hui, la fête est finie », écrivait l’Institut Thomas-More en octobre 2011 à propos de notre modèle social, quatre mois après la sortie de son rapport “163 milliards de plus… Analyse comparative de la dépense publique en France et en Allemagne”. Serait-il le énième rapport sur le mal français qui finirait sur une étagère, sur la pile, de plus en plus haute, où s’entassent les rapports, études, livres d’experts sur le sujet ? s’interrogeait l’Institut, pour lequel la période imposait au contraire l’amorce d’une prise de conscience française, à quelques mois de la campagne présidentielle de 2012. Le rapport revenait sur l’urgence et l’ampleur des mesures à prendre et proposait un argumentaire pour le faire entendre aux Français. La campagne présidentielle de 2012 devait être celle du courage des politiques, pour dire la vérité.

Il n’en a rien été. Le rapport, comme ses prédécesseurs, a bien fini sur la pile de l’étagère, et pas un mot n’a été prononcé par les deux principaux candidats sur l’insoutenable poids de notre dépense publique. Pas l’amorce d’un débat sur les 600 milliards dépensés chaque année pour financer un modèle social qui, de surcroît, est loin de faire ses preuves.

Non, il fallait réenchanter le “rêve français”. Le 31 mars 2012, The Economist titrait sur sa couverture « Un pays dans le déni », en détournant le tableau du Déjeuner sur l’herbe de Manet. On y voyait Hollande et Sarkozy, piqueniquant paisiblement, comme si de rien n’était. Sophie Pedder, l’auteur de l’article, se souvient encore de la vague de critiques à laquelle elle avait alors eu droit. « La France s’offre un système suédois avec des finances publiques plus proches de celles de l’Espagne », résumait la journaliste dans son livre paru en septembre 2012 le Déni français, les derniers enfants gâtés de l’Europe (JC Lattès). « Des sacrifices en France ? Les Français n’ont encore rien vu ! Tout l’effort reste à venir », prévenait- elle.

Vu de cet oeil étranger, notre modèle social, notre addiction à la dépense publique, notre capacité à continuer de rêver ou plutôt notre incapacité à regarder la vérité en face fascinent.

Des aides sociales aux seniors aux allocations familiales sans conditions de ressources, en passant par l’AME offerte aux étrangers sans revenu. Et de citer Bruno Le Maire, alors ministre de l’Agriculture, père de quatre enfants, reconnaissant qu’il n’était peut-être pas juste qu’il touche 5 000 euros d’allocations familiales par an. Sidération, encore, de découvrir l’indemnité maximale des cadres au chômage : 6 000 euros par mois, sans compter l’indemnité légale de licenciement, elle-même exonérée d’impôt sur le revenu et de cotisations sociales. 6 000 euros, presque le quadruple du salaire médian.

Pendant que nos voisins européens se sont engagés dans des plans de rigueur sans précédent, la simple évocation du mot “rigueur” est restée taboue en France. Aujourd’hui, le maillon faible de l’Europe, c’est nous. Le suivant sur la liste, qui risque d’être attaqué par les marchés pour avoir toujours beaucoup promis mais si peu réalisé…

Le bateau coule. Notre économie, asphyxiée, ne cesse de perdre des parts de marché, notre industrie est à l’agonie. Combien de temps acceptera-t-on encore de voir mille chômeurs de plus s’inscrire chaque jour à Pôle emploi ? Il y a urgence. Maintenant, il faut agir. Au-delà des mots et des déclarations de principe.

Valeurs Actuelles - José Pochat


Viewing all articles
Browse latest Browse all 5209

Trending Articles