Quantcast
Channel: Liberté d'Expression
Viewing all articles
Browse latest Browse all 5209

Lagardère, LVMH, Total: Pourquoi le Qatar investit en France.

$
0
0

L'émirat, qui vient d'augmenter à près de 13% sa participation dans Lagardère, investit tous azimuts dans les grands groupes français. Fruit d'une stratégie menaçante ou simple recherche d'investissements prometteurs? Les réponses de L'Expansion.com.

 Par Julie de la Brosse 

L'émirat, qui vient d'augmenter à près de 13% sa participation dans Lagardère, investit tous azimuts dans les grands groupes français. Fruit d'une stratégie menaçante ou simple recherche d'investissements prometteurs? Les réponses de L'Expansion.com.

LVMH, Total et de nouveau Lagardère... en moins d'une semaine le Qatar a pris des participations significatives dans trois grands groupes français. Et en moins de trois mois, il est devenu actionnaire à 100% du PSG et a racheté le Carlton. Alors certes, l'intérêt du Qatar pour la France n'est pas nouveau, et l'on sait que l'affinité diplomatique entre les deux pays s'est encore renforcée sous la présidence de Nicolas Sarkozy, mais certains commencent à s'interroger sur la philosophie de ces investissements. Répondent-ils à une logique extrêmement poussée et réfléchie ou sont-ils le fait d'"acteurs économiques irrationnels", comme le soutenait Bertrand Meheut, le patron de Canal +, après s'être fait raflé une bonne partie des droits de diffusion du foot français?

Depuis trois ans, le champion du gaz naturel liquéfié est devenu le premier investisseur du monde, par le biais de son fonds souverain Qatar Investment Authority (QIA) et de la Qatar National Bank.

Chaque année, il dépense de 20 à 30 milliards de dollars dans des acquisitions, et son patrimoine international devrait atteindre 210 milliards de dollars en 2012, dont 135 milliards pour QIA, selon des chiffres officiels dévoilés fin janvier. Aujourd'hui, son portefeuille d'actifs est extrêmement varié, allant de grands groupes spécialisés dans le luxe à l'immobilier, en passant par les banques, l'automobile ou encore le foncier agricole.

Total, Lagardère, LVMH.... de bonnes affaires?

A regarder de près les derniers investissements réalisés, on peut affirmer que la participation de 2% dans Total s'apparente à une bonne affaire pour l'émirat. Le titre du pétrolier s'est envolé de plus de 30% au cours des six derniers mois, et l'entreprise est extrêmement liquide, ce qui est un plus dans le cas d'un investissement financier. En terme stratégique, devenir le troisième actionnaire d'un géant comme Total n'est pas non plus un mauvais calcul lorsque l'on considère le savoir-faire industriel du pétrolier dans l'exploitation des énergies fossiles. Côté LVMH aussi, les investisseurs ont plutôt tendance à soutenir les choix de l'émirat. Le groupe de luxe se porte en effet à merveille, et cette participation avant tout symbolique (1%) dénote surtout l'intérêt poussé des Qatariens pour le luxe.

En revanche, la nouvelle montée au capital du groupe Lagardère à près de 13% du capital inquiète davantage. Dans cette affaire, certains observateurs craignent que l'opération ne se soit faite sans l'accord d'Arnaud Lagardère, comme cela a toujours été le cas jusqu'à présent. Et qu'elle vise à lui mettre un coup de pression dans le but d'engager des coopérations plus poussées dans certains domaines. Propriétaires du PSG, initiateurs de la future chaîne en français Al-Jazira Sport, organisateurs de la Coupe du monde de football 2022, les Qatariens sont en effet en partie engagés dans les mêmes activités que le groupe Lagardère, et pourraient avoir envie d'en profiter davantage. Par ailleurs, la petite monarchie du Golfe lorgne depuis longtemps sur EADS, dont Lagardère détient 7,5% du capital...

Or le Qatar ne s'en cache pas. Il cherche peut-être le meilleur retour sur investissement pour ses gazodollars, mais il souhaite surtout profiter d'échanges d'expérience dans des secteurs où les synergies sont possibles. Avec la Chine pour modèle, l'émirat, dont la taille est comparable à celle de la Corse, aimerait lui aussi bâtir des champions nationaux. Pour ce faire, le pays a d'ailleurs multiplié ces dernières années des joint-ventures avec des entreprises françaises, comme Vinci, Bouygues, Casino, ou encore Suez. "La feuille de route est claire. Nous nous sommes engagés à mettre notre savoir-faire à la disposition des Qatariens", expliquait récemment à L'Expansion Yannick Garillon, le directeur général de QDVC, la société commune de Vinci et Qatari Diar. En contrepartie, les groupes français remportent certains appels d'offres sur place. En janvier dernier, alors qu'il devenait le premier actionnaire de Lagardère, Qatar Holding avait précisé à l'AMF qu'il envisageait "de discuter avec tout acteur intéressé, le cas échéant, en vue de partenariats stratégiques permettant la création de valeur à long terme pour les actionnaires de la société". Un souhait réitéré ce lundi.

Mais le Petit poucet qatari a encore beaucoup de chemin à parcourir. En 2008, il a pris le contrôle de Cegelec mais sans jamais parvenir à transformer le tir, en raison d'un problème de gouvernance. Un an après, il revendait Cegelec à Vinci (contre une participation de 5,6%) avec une moins-value de 300 millions d'euros. Cette mauvaise expérience pourrait d'ailleurs expliquer que dorénavant l'émirat privilégie la recherche de rendements pérennes grâce à des prises de participation dans des grands groupes internationaux. D'autant que le moment est plutôt bien choisi, alors que la liquidité manque cruellement en Europe, et que les cours de Bourse ont beaucoup souffert de la crise de la dette.

Quoi qu'il en soit, ces investissements tous azimuts ne sont pas une mauvaise nouvelle pour les entreprises cibles. Selon les analystes, l'entrée au capital d'un actionnaire de long terme est globalement positive car elle est interprétée par les investisseurs comme un signe de confiance. La preuve, la nouvelle a été plutôt bien accueillie en Bourse (le titre Lagardère a pris 0,36%). Cette opération va "valider" la stratégie controversée d'Arnaud Lagardère, "en montrant qu'un gros investisseur croit comme lui au potentiel du sport", sous-entendu malgré les mauvais résultats de sa division Unlimited, conclut d'ailleurs un analyste.


Viewing all articles
Browse latest Browse all 5209

Trending Articles