Entendre des Réunionnais de souche se faire traiter de racistes par d'autres Réunionnais qui leur ressemblent, c'est drôle et atypique.
Par Caroline Artus de la Réunion pour Bd Voltaire
Le Front national à La Réunion existe, et il comptait même, en février 2013, 1.500 adhérents, chiffre en constante progression depuis. Et cinq candidats estampillés Bleu Marine se présentent aux élections municipales.
Un FN 974 ! Par exemple ! Mais comment est-ce possible, la population réunionnaise étant le fruit de tant de métissages ?
Notez que cette question à elle seule démontre sans ambiguïté le fait correctement admis que le racisme – si racisme il y a – viendrait d’une population majoritairement sous-mélanisée envers une population qui l’est – disons – un peu plus que la moyenne et parfois même nettement plus.
Mais alors, des Malbars (descendants d’Indiens), des Cafres (aux ascendants africains) et des Créoles blancs que des années de brassage n’ont pas réussi à pigmenter oseraient donc se présenter ensemble dans cinq communes de l’île, comme le prédit le secrétaire départemental, Jean-Claude Otto-Bruc !
Ce dimanche, les deux journaux locaux ont interviewé le candidat de Saint-Benoît, Jean-Yves Alin, dont on peut dire… qu’il n’est pas tellement blanc, pas plus que certains de ses colistiers présents d’ailleurs. Des colistiers à propos desquels la tête de liste de la ville de l’Est déclare : « Je suis le seul à La Réunion qui porte une liste comprenant des personnes d’origine malgache, mahoraise, comorienne, musulmane ».
Et la journaliste, qui pourrait difficilement renier ses origines malbaraises, a posé au candidat FN, qui fut longtemps encarté au parti socialiste, une question digne d’un homologue métropolitain pour qui les mots « Front national » déclenchent les habituelles bouffées nauséabondes : « Et ça vous est arrivé comment ? »
Entrer au PS, c’est épouser toutes les nobles valeurs de l’humanité. C’est entendu. Entrer au FN, c’est un peu comme tomber malade : ce serait même avoir contracté un méchant virus. Finalement, ce n’est pas vraiment de sa faute, n’est-ce-pas, une fois la fièvre tombée, il va sûrement se reprendre et se rendre compte de sa forfaiture. En somme, il faut souhaiter à l’infortuné de bons vœux de rétablissement.
Si le Front national a fait son nid à La Réunion, il est aussi présent en Guyane française, le pays natal de madame Taubira qui, nous l’avons remarqué, n’est pas tellement blanche non plus. Guyane à propos de laquelle elle déclarait en 2006, au micro de RFI :« Nous sommes à un tournant identitaire. Les Guyanais de souche sont devenus minoritaires sur leur propre terre. »
Dans les îles ultra-marines, qu’ils soient sympathisants ou candidats, ce sont des gens de toutes couleurs qui se retrouvent au Front national. Ils annoncent vouloir préserver leur identité, leurs traditions, leurs coutumes et se prémunir de l’immigration massive que l’exemple de Mayotte, à quelques heures d’avion seulement, avec ses 50.000 clandestins sur une population totale de 200.000 habitants, effraie.
Alors, entendre des Réunionnais de souche à la couleur de peau allant de la plus claire à la plus foncée se plaindre – parce qu’ils défendent les idées du FN – de se faire traiter de racistes par d’autres Réunionnais qui leur ressemblent, c’est drôle et atypique. C’est même très comique.